Accueil>Découvrons>Sainte Jeanne d'Arc>Jeanne et la France
Haut
 
Sainte Jeanne d'Arc
Editorial: Sainte Jeanne d'Arc.
Jeanne et la France.
Un peu d'histoire.
Jeanne d'Arc, sa vie.
La mission de Jeanne d'Arc.
Sainte Jeanne d'Arc.
Cantique pour Jeanne d'Arc.
Hommage à sainte Jeanne d'Arc.
Article : Sainte Thérèse et Jeanne d'Arc.






image Jeanne d'Arc















Sainte Jeanne d'Arc

Jeanne et la France

L'épopée de Jeanne d'Arc n'a duré que deux ans : un an de combats, un an de prison. Son éclat a fait oublier sa brièveté. Elle ne prend cependant tout son sens que replacée dans son contexte.
C'est un météore qui traverse le ciel tourmenté de la guerre de Cent Ans, traçant sa brusque traînée de feu avant de sombrer derrière l'horizon. Mais l'éblouissante clarté s'était inscrite à jamais dans les regards ! Jeanne avait brillé et s'était défaite comme un songe, mais elle avait mis le feu aux poudres ; elle avait été le premier détonateur et le premier brûlot.
Certes, elle avait été victorieuse mais, surtout, elle avait remis l'épée et la lance au poing des combattants, rendu l'espérance aux cœurs flétris par des échecs quasi constants, à un peuple excédé de misères et d'humiliations. Par son sacrifice même, elle avait préparé la voie triomphale de la libération du Royaume des Lys.
Dans l'église de Domrémy, comme sous les remparts d'Orléans et dans la geôle obscure où les Anglais l'enchaînaient jour et nuit, elle incarnait un moment de la France. Elle était la France ! Non celle des complaisances et des renoncements, non ce pays discrédité par les démagogues et par ces théoriciens pour lesquels la politique est une arène et qui, faute de savoir maintenir et créer, sapent et détruisent, mais la France profonde en laquelle l'avenir et le passé se donnent la main, la France active et silencieuse, le sel de cette vieille terre dont chaque ville, chaque village, chaque sentier, chaque sillon conte une longue et superbe histoire. En 1429, Jeanne avait le visage de cette France-là. Elle était le premier sourire venant après les larmes.
Pour jeter une lumière vraie sur le rôle qui fut le sien, sur la mission qu'elle assuma, il est donc nécessaire de montrer d'abord dans quel chaos le beau royaume de France se trouvait plongé, comment cette puissance qui, par son peuplement comme par ses ressources propres, tenait la première place en Europe, décrut, d'un règne à l'autre, au point d'être submergé par l'envahisseur et quasi anéantie. A croire que les Valois ruineraient l'œuvre des Capétiens directs, leurs devanciers ! Ce constat rendra plus sensible et plus évident le retournement de situation opéré par Jeanne en quelques mois. C'était vraiment au terme d'une longue, d'une oppressante nuit, le soleil qui se mettait à reluire.
Pour autant, la personnalité de Jeanne est difficile à cerner. Certes, il est possible - et l'on ne s'en est pas privé - de privilégier tel ou tel des aspects de son caractère, mais il importe peu qu'on la considère comme patriote, résistante ou mystique. Elle fut tout cela. Elle fut surtout simple et vraie, ne se prenant ni pour une héroïne ni pour une sainte, ne tirant aucune vanité de ses actes, répétant ici et là, et même devant ses juges, qu'elle n'était que l'instrument de la Providence. Il me paraît indispensable de souligner que ce n'était ni une illuminée, ni une malade. Elle était au contraire parfaitement équilibrée. Si elle avait présenté une anomalie quelconque, souffert de crises d'ordre pathologique, montré une sensibilité excessive, nous le saurions, car les témoignages abondent sur son comportement. Elle n'était pas une démente mais un esprit sain dans un corps sain.
Croyants et incroyants se sont acharnés à expliquer le mystère de sa destinée, cette force secrète qui grandit en elle jusqu'à la métamorphoser en chef de guerre, armant soudain le bras de cette créature qui était, dans les champs et dans la maison de Domrémy, tout amour, toute humilité, toute douceur. Mais aussi cette conviction intime qui permit à une fille illettrée de tenir tête à un aréopage de théologiens aussi chevronnés que malveillants, et même de les jeter dans l'embarras. Ses détracteurs ont essayé en vain d'altérer son image.
Sans doute notre pays ne manque-t-il pas de femmes héroïques. Pourtant aucune d'elles ne se haussa au niveau de Jeanne, ne sauva la patrie à elle toute seule ! Que Jeanne fût restée dans son village à filer la laine, ou que les théologiens de Poitiers l'eussent récusée, que Charles VII lui eût refusé sa confiance ou qu'elle eût échoué sous les murs d'Orléans, et c'en était fait du sacre de Reims et probablement de l'indépendance du royaume ! Tout était perdu quand elle parut ; tout redevint possible après Orléans ; la libération de la France était en germe dans son martyre. Les politiciens l'ont revendiquée, au hasard des opportunités, mais ils n'ont pu dénaturer ses intentions, ni sa personne, ni sa grandeur. Les historiens du monde entier, ou presque, se sont penchés sur son cas, parce qu'il est unique. Mais elle est pour nous, gens de France, un souvenir sacré.
On peut remettre ses pas dans ceux de Jeanne, refaire, à la même saison, l'itinéraire qu'elle parcourut de Vaucouleurs à Chinon, d'Orléans à Reims, de Compiègne à Rouen où se consomma son sacrifice ; c'est pourtant à Domrémy où elle naquit, grandit, accepta d'un cœur vaillant l'effrayante mission qui lui était confiée, que sa présence reste la mieux perceptible, la plus proche, car il est des lieux où souffle l'Esprit.


Extrait de JEANNE D'ARC et la guerre de Cent Ans
de Georges BORDONOVE
édition PYGMALION / Gérard Watelet